Lumières
Image utilisée pour désigner un vaste mouvement qui marque la littérature, l’art, la philosophie, la culture, les pratiques politiques au XVIIIe siècle. Il ne concerne pas seulement la France mais l’ensemble de l’Europe et atteint les colonies américaines (la formation des Etats-Unis est marquée par les Lumières). L’image de la lumière a été associé à ce mouvement presque partout : Aufklarung, Enlightemment, Illuminismo. Ces termes ne recouvrent pourtant pas partout exactement la même réalité. La lumière qui était associée depuis longtemps à l’intelligence divine, devient désormais lumière « naturelle », celle de la raison et de l’intelligence humaine, du progrès et de la science. Elle a valeur universalisante. Le pluriel « lumières » suggère à la fois pluralité des intelligences, la relativité des croyances et des formes de pensée, la variété dans leur mode d’action et l’étendue des domaines qui tombent sous leur juridiction. Donc unité et diversité des Lumières.
Il n’est pas simple de les définir, car il ne s’agit pas d’une école littéraire ou d’une philosophie précise mais d’un mouvement de pensée qui s’incarne dans plusieurs philosophie différentes et dans des attitudes diverses. La définition la plus célèbre de Kant dans un texte répondant à la question Qu’est-ce que les Lumières ? : « Les Lumières, c’est la sortie de l’homme hors de l’état de tutelle dont il est lui-mêle responsable […] Sapere aude ! [ Ose avoir du jugement !] Aie le courage de te servir de ton propre entendement sans la conduite d’un autre.» Courage donc de la pensée libre, indépendante et adulte, qui s’affranchit de la tutelle religieuse et politique.
Les Lumières se sont aussi incarnées dans une devise, proposée par Dumarsais dans un essai souvent repris et qui définit le philosophe, devise empruntée à Térence : « Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger.» Cela revient à souligner le lien des Lumières avec l’humanisme de la Renaissance. Cette attitude philosophique prend sens dans différents domaines. Du point de vue métaphysique et religieux, les positions sont assez variées : Voltaire est déiste, Diderot et d’Holbach athées, d’Alembert sceptique, mais tout s’accordent pour donner à la métaphysique une importance secondaire par rapport à la morale. C’est l’intervention active du philosophe dans le monde qui est importante et non pas la spéculation abstraite. Cette intervention doit être dirigée contre toutes les formes de préjugés, qu’ils soient religieux ou sociaux. Les Lumières luttent ainsi pour la tolérance religieuse. On sait les combats menés par Voltaire dans ce domaine au moment de l’affaire Calas, du nom d’un protestant injustement condamné à mort et dont le philosophe obtint la réhabilitation (Traité sur la tolérance).
L’Eglise est le grand adversaire de ce mouvement et pourtant elle-même n’y est pas insensible et connaît des évolutions dans ce sens. La laïcisation de la pensée juridique et politique enfin conduit à des attitudes politiques diverses qui vont d’un éloge de la monarchie tempérée au choix d’une république à l’antique, en passant par le despotisme éclairé dont on voit des modèles en Frédéric II de Prusse, Catherine II de Russie ou Joseph III en Autriche.
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