Burlesque
Ce mot vient de l’italien burlesco, « comique, plaisant » ; il désigne, en France, au XVIIe siècle, un style reposant sur le contraste des tons : le poète fait parler des héros tragiques ou épiques comme des personnages de comédie, en utilisant un registre lexical bas et vulgaire par rapport à la langue élevée traditionnelle. Le coeur du procédé repose donc sur une distorsion de la hiérarchie traditionnelle des styles, telle que la définissait Aristote dans sa Poétique : selon lui, chaque personnage devait parler dans un style conforme à son rang (style élevé dans la tragédie qui met en scène des princes ; style bas dans la comédie, qui met en scène des bourgeois).
Le procédé est donc très efficace du point de vue de la critique littéraire et il a joué un grand rôle dans la genèse de nouvelles formes. Au XVIIe siècle notamment, alors que l’esthétique d’ensemble repose sur la mémoire et l’imitation, la parodie est vite apparue comme un genre privilégié. Saint-Amant (1594-1661) s’inspire des burlesques italiens en 1643 dans La Rome ridicule. C’est dans cette lignée que Scarron entreprend son Virgile travesti (1648-1653), qui est une traduction-adaptation burlesque de l’Eneide de Virgile. Certains critiques condamnèrent les excès du genre, et tentèrent d’en définir une poétique tempérée, susceptible de plaire au goût mondain.
Ainsi compris, le burlesque a persisté à l’époque classique, sous la plume de Boileau (Arrêt burlesque, Le Chapelain décoiffé et Le Lutrin), et de, façon plus subtile mais omniprésente dans les Fables de la Fontaine. Au XVIIIe siècle, le Télémaque travesti (1715) de Marivaux, mais aussi les effets plaisants de contraste que Montesquieu introduit dans ses Lettres persanes sont autant d’avatars du burlesque, dont le caractère corrosif plaît tant à l’esprit des Lumières.
Le XIXe siècle, après avoir loué le goût du grotesque (Gautier, Hugo) et fait du mélange des tons une esthétique (Musset), rend au burlesque ses lettres de noblesse avec la modernité (de Rimbaud au surréalisme, en passant par Laforgue et Apollinaire).
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